Le Château
Un peu d’Histoire
Ce château a bien sûr une histoire, il appartient au patrimoine local, c’est pourquoi nous allons tenter de lui redonner le lustre des siècles passés car il est le seul témoin de la naissance de notre ville qu’il a vue grandir, souffrir et prospérer.
Il semble, si l’on en croit les historiens, que notre ville a longuement vécu dans la tranquillité bien que des événements importants aient eu lieu au cours des siècles en Haute Vallée.
Les premiers habitants furent sans doute les Ibères qui envahirent une grande partie de l’Europe. Ils s’installèrent sur la rive droite de l’ATAX (Aude) d’où ils furent chassés par d’autres envahisseurs, les Celtes ou Gaulois qui vinrent occuper cette région 300 ans environs avant J.C.. Il s’agissait là de guerriers barbares cruels et incultes d’origine germanique et même asiatique.
Vivant de chasse et de pêche et de maigres cultures, ils se laissèrent gagner par la douceur du temps, Oublièrent leur agressivité originelle et subirent avec une certaine sérénité et une bien faible résistance l’arrivée des légions Romaines lancées à la conquête de la Gaule, un siècle environ avant Jésus Christ.
C’est de cette époque que date le premier ouvrage de défense édifié à l’emplacement même du château sur la colline de St Pierre ; il s’agit d’un fort de défense comme il en fut édifié d’autres en des points stratégiques dominant des axes de pénétration.
Il est bien évident que ces routes ou chemins d’accès ne nous sont plus familiers car les grands axes actuels n’ont pas obligatoirement, utilisé les sentiers de ces lointaines époques, et la vallée dans laquelle se trouve située notre ville était particulièrement dangereuse par sa situation, car le fleuve Atax avait alors un débit très important et l’emplacement actuel de la ville était très souvent immergé par d’importantes crues ce qui avait rendu le terrain marécageux.
Cela explique l’implantation de la cité sur la colline de St Pierre. Dans les anciens grimoires, cette agglomération était signalée sous le nom de Calianum pour devenir QUILIANUS en 781 soit sous la domination Romaine, mais antérieurement le nom primitif dont il est fait état dans les anciennes chroniques est KILIANUS ce qui tiendrait à confirmer une origine Gallo Celtique.
L’importance de l’Oppidum construit à cet emplacement se justifie par le fait que les divers chemins qui venaient du Pays de Sault, du Roquefortés, du Pays de Kerkorb ou encore du Pays de Fenouillèdes se croisent en cet endroit sur les bords de l’Atax. Les avis sont assez partagés sur l’importance de cette forteresse mais il est indéniable que ce mamelon rattaché aux premiers contreforts des Pyrénées avait une valeur stratégique importante ce qui semble donner raison à ceux qui ont situé à cet endroit une importante cité fortifiée.
D’ailleurs lorsque vers le cinquième siècle les Wisigoths prirent position en Haute Vallée, ils construisirent à l’emplacement même du Château et sur les Bases du Castellum Romain une puissante forteresse qui devint par la suite le château de Quillan.
Deux siècles plus tard la cité, le Château, et les terres de Kilianus étaient inféodées à l’église St Just de Narbonne. C’est à ce moment que fut modifié 1’orthographe du nom et que l’on écrivit QUILIANUS.
Les Wisigoths étaient réputés comme étant de remarquables bâtisseurs. Ils réalisèrent à la même époque sur des soubassements romains le principal des forteresses de la Cité de Carcassonne et on leur attribue également plus près de chez nous des fortifications dont l’origine est assez confuse comme la Tour de FA et RENNES en particulier.
A la fin du VIIème siècle, la Haute Vallée, voie naturelle de pénétration eut à subir de nombreuses razzias par les hordes sarrasines qui en un siècle d’occupation firent beaucoup de mal à notre région.
Charlemagne pacifia la contrée et renforça durant son règne l’organisation administrative, militaire et religieuse de la région face au monde musulman repoussé derrière les frontières d’Espagne.
Le Comte MILON, l’un des grands feudataires de Charlemagne qui s’était approprié de nombreux domaines appartenant aux églises de St Just, dont QUILLAN et son Château, dut restituer à l’archevêque DANIEL, Quillianus et toutes ses dépendances en vertu d’une sentence du Roi Charles le Chauve datée de l’an 804. Cela fut un bien pour notre ville, qui, rattachée au domaine du puissant Archevêque échappait ainsi aux compétitions rivales des Seigneurs des environs. Cela fut également cause que QUILLAN ne soit pas annexé au Monastère de ST MARTIN LYS, cet établissement religieux fut en effet richement doté par le Roi Charles le Chauve qui en 898 lui donna côté Nord des terres s’étendant jusqu’aux limites de QUILLAN.
Alors que la ville commençait à se développer et à prendre de l’importance le Comte de Barcelone Roi d’Aragon qui prétendait avoir des droits sur notre région, entra avec une nombreuse armée dans le pays de Fenouillèdes et dans la Vallée de l’Aude pour s’emparer de toutes les terres avoisinantes et ce jusqu’à LIMOUX. S’il ne resta pas longtemps dans cette dernière ville, il s’implanta plus solidement dans notre région de la Haute Vallée qui porte encore les traces de cette invasion, puisque nous reste à QUILLAN le quartier de l’Aragou constitué par la partie de la ville située sur la droite du fleuve.
C’est le Vicomte de Béziers qui, allié au Comte de Toulouse parvint à refouler les troupes espagnoles en Roussillon, et QUILLAN rentra à nouveau au pouvoir de son suzerain légitime, l’Archevêque de Narbonne. Les troupes de l’ost devaient en 1209 déferler sur les provinces occitanes avec à leur tête Simon de Montfort pour combattre l’hérésie. Ce fut la croisade contre les Albigeois. Le chef des croisés dut
livrer une importante bataille d’arrière garde entre la vallée de la Sals et RENNES le CHA TEAU ce qui n’empêcha pas la prise de toutes les places fortes et la marche victorieuse des croisés vers Puivert.
Simon de Montfort confisqua les villes et les châtellenies des seigneurs qui avaient combattu contre lui et les remit à ses principaux lieutenants ; la ville et le château de Quillan revenant à Pierre de Voisins.
Cette décision ne fut pas du goût de l’archevêque de Narbonne qui ne voulait rien perdre de son domaine et qui fit intervenir en 1216, le Pape Honoré III pour être remis en possession des biens dont il avait été dépouillé. Soutenu par le Roi de France, la légitimité de sa demande fut reconnue par le Pape qui le remit en possession de ses biens. Et cela aussi paradoxal qu’il paraisse, fut une excellente chose pour notre ville car les militaires qui voyaient les Bourgeois d’un mauvais œil, n’auraient jamais permis le développement industriel de la Ville et de la Région, alors que sous l’influence de l’Eglise la Ville prit de plus en plus d’extension, vint s’établir sur les bords de l’Aude à côté du Moulin et fut élevée au rang de cité.
Après le traité de Paix de Meaux en 1229 qui marquait la fin des Croisades, le Languedoc fut rattaché à la couronne de France ainsi que le Château de Quillan.
La Haute Vallée est alors placée sous contrôle administratif de la Sénéchaussée de Carcassonne et, la frontière espagnole étant toute proche, le château fut réarmé et équipé pour préserver toute nouvelle invasion des troupes Aragonaises. Il fut reconstruit, pour les parties détériorées, dans sa conception actuelle et tel que l’on peut l’imaginer visuellement avec un peu plus de hauteur, et le donjon et les poivrières en plus.
A la fin du XIIIème siècle, QUILLAN fut classé Ville Royale. A partir de cette époque le Château fut doté d’un gouverneur qui commandait pour le Roi, la Ville étant administrée par des Consuls. Le Gouverneur était un des principaux Officiers du Comte de Joyeuse qui résidait dans son Château de Couiza, lieu de résidence habituelle du Lieutenant du Roi en Languedoc.
La ville de Quillan comme toute la Vallée de l’Aude vécut au cours de l’année 1572 un hiver particulièrement rigoureux auquel succéda une saison estivale d’une exceptionnelle sécheresse, ceci au point que les récoltes furent totalement perdues, ce qui provoqua une famine sans précédent. Et comme si cela n’était pas suffisant, une épidémie de peste s’ensuivit qui exerça des ravages considérables parmi la population. Toute la Vallée offrait un tableau de misère et de désolation, ce qui se compliqua par la présence de loups affamés qui rodaient en bande et dont il fallut se protéger, en dressant des palissades quant il fut possible de le faire, pour éviter les attaques de ces redoutables carnivores.
Et c’est justement au moment où ces calamités causaient des ravages considérables parmi la population, que les compagnies de religionnaires, les Huguenots s’attaquèrent à tout le diocèse d’Alet, tuant, pillant, incendiant avec une rage folle. Et alors que le pays était totalement en ruines, les troupes calvinistes vinrent assiéger QUILLAN qui était Ville fortifiée ceinte de remparts tout au long de ce que l’on appelle les allées, ces allées étant un canal rempli d’eau.
La ville se défendit avec beaucoup d’énergie mais le Château pas suffisamment armé ne put la résister et le 30 Août 1573 un dernier assaut particulièrement violent vint à bout de la résistance et la Ville tomba aux mains des assaillants. Une partie des fortifications fut détruite à cette occasion et jamais reconstruite, quand au château, il résista et ne fut pas investi par les assaillants. Cette première occupation fut de courte durée et l’armée Catholique eut tôt fait de reprendre QUILLAN. Elle avait prévu de nouveaux travaux de défense mais avant que ceux-ci ne commencent, les calvinistes investissent la Ville une nouvelle fois et y commirent les pires excès, cela se passa en 1575 et cette occupation devait durer 5 ans. Ce fut une des périodes les plus tristes de la vie de notre cité. A partir de cette période, QUILLAN ne fut plus une place guerrière et seul le Château resta armé et fut entretenu. L’un de ses derniers Gouverneurs fut Jehan de JUVIS qui avait rang de Capitaine Commandant.
Lorsque les hostilités cessèrent entre la France et l’Espagne et sitôt après le traité des Pyrénées en 1659, le Château n’intéresse plus personne et les requêtes des Consuls de la ville laissèrent sourd le Roi et les Evêques d’Alet, le château abandonné commença à se délabrer.
Pendant le même temps, la ville se développa et de cité guerrière devint un important centre industriel et commercial. Au XVIIème siècle déjà QUILLAN disposait d’établissements particulièrement florissants et tout particulièrement les Forges Catalanes au lieu dit LA FORGE, des fabriques de Drap, Tanneries, Mégisseries, Fabrique de Clous etc… et par voie de conséquence se tenaient en ville d’importants marchés et des foires qui jouissaient d’un grand renom. Ainsi, la ville de Quillan avait acquis un rang très important dans la Province et le premier rang dans le diocèse lorsque survint la Révolution.
Par suite de modifications qui s’opérèrent dans le régime administratif, la ville de QUILLAN grâce à son importance et à sa position géographique devint Chef lieu de District ou d’Arrondissement qui recouvrait & cantons soit ; BELCAIRE, BELESTA, ESPEZEL, ESPERAZA, MARSA, RIVEL. RODOME. ROQUEFORT et bien entendu QUILLAN.
Mais un nouveau drame allait affecter notre ville. En 1792, un incendie d’origine criminelle, détruisit complètement le vaste local de l’administration du district. Ce fut un malheur considérable, car toutes les archives des Villes et des Églises du District furent détruites, et parmi, des documents de la plus grande importance.
Le château quant à lui, fut désarmé en 1706. Les canons furent enlevés et l’édifice abandonné. Il fut déclaré en état de vétusté en 1735 et démantelé peu après.
Confisqué sous la Révolution en 1789, il fut vendu à des particuliers de 11 Brumaire de l’An XIV de la République. Il fut alors pillé et si l’on cherchait dans les cloisons de bien des habitations de la ville, l’on pourrait retrouver la majorité des boiseries noyées dans les murs au lieu et place de chevrons.
Les ruines ont été achetées par la Ville de Quillan en 1950 afin de conserver les restes de ce monument caractéristique de l’architecture de la fin du XIIIème siècle. Ces ruines sont inscrites depuis Avril 1954 à l’inventaire supplémentaire des Monuments historiques.
Si les Quillanais veulent conserver des vestiges du passé, il est temps de faire l’effort qui s’impose pour sauver ce qu’il en reste et tenter de redonner un peu de son aspect d’origine à cet important élément de notre patrimoine.